Lettre du pasteur avril 2025

La résurrection des vivants !

Croyez-vous à la résurrection des vivants ?

Non ! Je ne me suis pas trompé ; c’est bien la question posée. Je n’insulterai pas votre foi en vous demandant et-ce que vous croyez à la résurrection des morts. Elle est évoquée dans le dernier article du Symbole des apôtres. J’évoque bien la résurrection des vivants. Et pour en parler, en ce mois de Pâques, je vous propose une lecture commentée du récit de la résurrection de Lazare (Jean 11:1-44).

Nous avons tendance à nous focaliser sur la résurrection du mort, or il est aussi question dans ce récit, de la résurrection des vivants. Et pour bien distinguer les deux, je fais le choix de parler de réanimation dans le cas de Lazare et de résurrection pour Marthe et Marie. Nous assistons donc ici à la réanimation d’un mort, et à la résurrection de deux vivantes. Marthe croit à la résurrection des morts. Lorsque Jésus lui dit : « Ton frère ressuscitera. » (Jean 11. 23). Marthe qui a bien appris son catéchisme, répond : « Oui, je sais, qu’il ressuscitera, au dernier jour. » (Jean 11. 24).

L’expérience que vont faire Marthe et Marie, c’est vraiment celle de la résurrection. Croyez-moi ou non, mais je suis persuadé que Dieu cherche davantage à ressusciter des vivants, qu’à réanimer des morts. Marthe et Marie ne doutaient pas que Lazare ressuscite au dernier jour. Mais elles doutaient que leur frère ressuscite ici et maintenant, pire encore elles doutaient de pouvoir vivre avec cette douleur, celle de l’absence de ce frère qu’elles aimaient tant. À Marthe qui est bien vivante, Jésus dit : « Je suis la résurrection et la vie. Crois-tu cela ? »

Marthe n’a aucun mal à croire à la vie future, au-delà de la mort. Son problème c’est de vivre maintenant avec le drame qu’est cette séparation. Je l’imagine se dire : « Mais pourquoi, le maître me parle de la résurrection à la fin des temps, alors que c’est aujourd’hui que je souffre, c’est maintenant que je dois faire face, c’est maintenant que mon frère me manque et s’il avait été là, mon frère ne serait pas mort, et je n’aurais pas eu à affronter cela. » Jésus va précisément répondre à son besoin, non en réanimant Lazare, mais en la ressuscitant elle : « Je suis la résurrection et la vie ! Crois-tu cela ? » On ne parle plus de Lazare, mais bien de Marthe : « Crois-tu que je puisse apporter la vie dans ta souffrance ? En réponse à ta demande de secours, en réponse à ta détresse, moi je t’offre la résurrection et la vie. Crois-tu cela ? » En d’autres termes, « Est- ce que tu me fais confiance ? » Marthe comprend ce dont parle Jésus et lui répond : « Je crois ». A cet instant, c’est donc elle qui hérite de la Vie. Jésus ne lui a pas seulement donné la clé de la vie future, mais celle également de la vie présente. Et visiblement, Marthe est transformée. Elle demandait de l’aide à Jésus, elle a été aidée au-delà de toute espérance. Elle arrête de lui demander quoi que ce soit, et elle se précipite vers sa sœur pour qu’à son tour elle puisse en bénéficier.

Et vous qui êtes vivant et qui lisez ces lignes, croyez-vous cela ?

Il y a des choses qui rendent les vivants morts à l’intérieur : La rancune peut faire mourir en nous le pardon. C’est peut-être la haine qui fait mourir en nous l’amour. L’égoïsme est aussi un mal qui fait mourir en nous la générosité ! Que dire de la colère qui fait mourir en nous la douceur ! C’est peut-être l’orgueil qui fait mourir en nous l’humilité ! Pour de nombreuses personnes, c’est le désespoir qui fait mourir en elles l’espérance ! Chez d’autres, la bienveillance est tuée par l’intolérance. C’est peut-être la tristesse qui fait mourir en nous la joie ! La liste est encore longue… mais le Christ veut nous faire ressusciter, au pardon, à la générosité, à la douceur, à l’humilité, à l’espérance, à la bienveillance. Il veut nous faire ressusciter à l’espérance, à la joie.

La résurrection est bien un événement à vivre dans ce temps présent. Louis Évely, un écrivain et prêtre belge a écrit : « Personne ne vous a-t-il jamais parlé, pardonné, aimé assez pour vous ressusciter ? N’avez-vous jamais ressuscité personne ? Avez-vous expérimenté la puissance de vie qui jaillit… dans un pardon…? Comment croire à la résurrection future si vous n’avez pas l’expérience de résurrections immédiates ?»

Pourquoi alors Jésus s’est-il préoccupé de réanimer Lazare ? Sur le plan de la vie éternelle, que le corps de Lazare soit vivant ou mort, cela ne change rien, ce que le Christ a rendu vivant reste vivant, même dans la mort. Mais en ressuscitant Lazare, Jésus montre que la vie en ce monde a pour lui de l’importance. Si Jésus pouvait redonner de la vie physique à Lazare, même pour un temps, il a voulu le faire. Il y avait des gens qui aimaient Lazare : ses sœurs, Jésus et ses autres amis, ce n’est pas rien. C’est peut-être là aussi une simple et bonne raison qui pousse Jésus à ressusciter Lazare, l’envie de manger encore une fois tous ensemble. Mais, comme chaque événement raconté dans l’Évangile, cette réanimation est le signe d’une réalité spirituelle. La résurrection de Lazare a donc pour objectif de nous donner une image de ce que peut et doit être la résurrection des vivants. Marthe ressuscite en faisant confiance en Jésus comme Sauveur, comme Fils de Dieu, et la résurrection de Lazare a une portée pédagogique, c’est un message qui nous est adressé. Et ce message n’est pas que le Seigneur va à chaque fois ressusciter nos morts pour nous permettre de profiter encore d’eux. La résurrection de Lazare est temporaire, c’est un geste relativement anecdotique pour nous, mais c’est un geste immense s’il est compris comme disant la résurrection que Marthe va vivre ce jour-là. Ce geste de Jésus montre que Dieu ne se découragera pas de venir ouvrir nos tombeaux, même si nous y sommes enfermés depuis des jours et des jours, depuis des années, même si ça ne sent pas très bon, Dieu ouvre nos tombeaux et nous appelle à en sortir. Voilà comment Jésus ressuscite des vivants. Une résurrection qui est à vivre ici et maintenant. Voilà le message de Pâques ! Tout peut être différent : les larmes peuvent être surmontées, les peurs ne sont pas éternelles, chaque prière reçoit une réponse, la lumière est plus importante que la nuit, la joie vient pour ceux qui sont tristes, la paix touche les cœurs abattus, les puissants perdent et les humbles triomphent, la force et la haine ne peuvent rien contre l’amour, les chaînes se brisent, la mémoire ne fait plus souffrir, un monde nouveau est possible. Et ce n’est pas seulement un opium qui nous aide à supporter la réalité. Voilà ce que contient ces paroles de Jésus : « Je suis la résurrection et la vie ! »

Crois-tu cela ?

En vous souhaitant de vivre une Pâques 2025 qui oriente définitivement votre existence vers la vie.

Avec mes meilleures pensées fraternelles

Raymond Ruffe